Église de la Vôge

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La lettre à Philadelphie

 Ap 3.7-13

Introduction & Lecture biblique

=> Série de prédications sur les « 7 lettres aux Eglises » dans les chapitres 2 & 3 du livre de l’Apocalypse. Suite.

Après Ephèse, Smyrne, Pergame, Thyatire, Sardes : la 6ème des 7 lettres, avant dernière, adressée cette fois à l’Eglise de Philadelphie

 

Ap 3.7-13

Une lettre qui a une particularité, par rapport à toutes les autres : c’est la seule qui ne comporte aucune critique, aucun reproche de la part de Dieu… Ce qui la rend évidemment quelque part un peu plus « sympathique » que les autres. Mais cela ne veut pas pour autant dire que tout était facile, à Philadelphie, bien au contraire.

I. Philadelphie, une porte ouverte devant toi

— « (…) tu as peu de puissance » ( v. 8 )… L’Eglise de Philadelphie était à ranger dans la catégorie des Eglises « faibles ». On ne sait pas exactement pourquoi.

š  Philadelphie était

une ville plutôt modeste, qui n’avait pas derrière elle une trop longue histoire. En pleine région volcanique, elle était réputée pour la fréquence de ses dangereux tremblements de terre, et – quand même aussi – pour la fertilité de la campagne environnante.

š  Quant à l’Eglise de Philadelphie, on n’en sait quasiment rien, mise à part cette remarque sur son peu de puissance. Etait-ce parce que la communauté était peu nombreuse ? Parce que ses membres étaient d’origine modeste, éventuellement peu considérés ? Nous n’avons pas plus de précisions. L’essentiel, cependant, c’est que cette Eglise a visiblement su rester en tout point fidèle à Jésus-Christ ( « tu as gardé ma parole (…) tu n’as pas renié mon nom », cf. v. 8 ), et qu’aucun reproche ne lui est adressé.

 

Nous avons déjà là des éléments intéressants. Entre autres que la faiblesse et la petitesse ne sont pas un péché, – ça rassure ! –, mais aussi encore que cette faiblesse et cette petitesse ne sont pas non plus une excuse à l’infidélité, – et là, ça interpelle ! –. C’est vrai, quoi… L’Eglise de Philadelphie était justement celle qui aurait pu le plus facilement justifier le fait de n’être pas restée fidèle et engagée pour Jésus, parce qu’elle n’avait que peu de puissance : « Ce n’est pas notre faute si nous ne pouvons pas obéir et rester fidèles, engagés, etc. : nous avons si peu de moyens, nous sommes si peu nombreux, il faut bien nous comprendre Seigneur ! »… Ne pensons-nous pas parfois comme cela ( à notre niveau personnel, mais peut-être aussi au niveau de notre Eglise ) ? Et voilà que l’Eglise de Philadelphie, avec son peu de puissance, – elle qui aurait peut-être eu le plus de raisons de ne pas rester fidèle en prétextant sa situation de « faiblesse » –, voilà que cette Eglise, – la plus faible par rapport aux 6 autres Eglises qui étaient toutes plus grandes et puissantes qu’elle –, est justement celle qui va montrer le plus bel exemple de fidélité… ça fait réfléchir, non ? Surtout quand on est soi-même dans une Eglise dont on a peut-être aussi envie de dire qu’elle est petite et avec peu de puissance…

 

à La faiblesse et la petitesse ne sont pas un péché, mais pas non plus une excuse à l’infidélité ou au laisser-aller dans ses engagements sous prétexte qu’on n’a pas les moyens de faire mieux… Pourquoi ? Parce que c’est justement dans la faiblesse et le peu de puissance de l’Eglise que va se manifester la puissance de Dieu.

 

— « (…) j’ai mis devant toi une porte ouverte que personne ne peut fermer » ( v. 8 ). La manière de parler est peu intrigante. Quelques explications.

š  Jésus vient juste de se présenter comme « celui qui a la clef de David, celui qui ouvre de telle sorte que personne ne ferme, celui qui ferme de telle sorte que personne n’ouvre » ( v. 7 ). Il y a là en fait une référence à un passage de l’AT, dans le livre d’Es, qui mentionne un certain Shebna qui avait semble-t-il avait usurpé l’office de gouverneur du palais royal. Il avait même visiblement poussé l’audace jusqu’à se creuser un sépulcre dans le roc : une manière de marquer sa prétention d’appartenir à la classe riche et son intention de s’incruster dans sa place de gouverneur jusqu’à la mort. Dieu lui a alors envoyé Esaïe pour le démasquer : cf. Es 22.15-23 ( & ).

š  La clef de la maison de David, dans ce contexte, symbolisait le pouvoir et l’autorité royale, que Dieu entendait bien confier à qui il voulait, selon son choix, parce que c’était à lui seul qu’ils appartenaient. Dieu seul pouvait donner cette clef, symbole de pouvoir et d’autorité confiés à une personne.

š  Et voilà que Jésus se présente justement à l’Eglise de Philadelphie comme « celui qui a la clef de David »… Autrement dit, comme celui à qui appartiennent tout pouvoir et toute autorité sur cette terre, – personne ne peut ouvrir ce qu’il ferme ou fermer ce qu’il ouvre –, et, dit-il, « j’ai mis devant toi une porte ouverte que personne ne peut fermer » ( v. 8 )… Image donc du Christ qui, possédant le pouvoir suprême et absolu dans sa création, promet maintenant à la communauté de Philadelphie d’user pour elle de ce pouvoir, de la mettre au bénéfice de ce pouvoir, un pouvoir que nul ne peut contester…

š  La porte ouverte, bien sûr, est celle du Royaume, de la Jérusalem céleste offerte aux chrétiens ( cf. la fin du livre de l’Ap ) : à la fois perspective et promesse du Seigneur pour son Eglise, et personne, – aucune force, aucun pouvoir, aucune autorité, etc. –, ne pourra s’y opposer… Parce que personne ne peut s’opposer à la réalisation du projet que Dieu a en réserve pour ceux qui lui resteront fidèles, en dépit des circonstances pas toujours favorables .

 

à Un grand message d’encouragement, donc, adressé à cette Eglise qui a peu de puissance. C’est justement dans ce peu de puissance que va se manifester la puissance de Dieu ! Promesse extraordinaire, rappel : la faiblesse ou le manque de puissance n’empêchent pas l’œuvre de Dieu de se faire, c’est même plutôt le contraire. C’est quand on a conscience de notre faiblesse et de notre manque de puissance que le Seigneur peut le mieux nous conduire, vers sa victoire...

 

Cela dit, il y a aussi, pour que la porte soit – et reste – ouverte, des conditions…

II. Pour que la porte soit – et reste – ouverte…

Il ne faudrait pas, en effet, déduire de ce que nous venons de dire que le seul fait d’être faible et sans grande puissance nous garantirait la protection de Dieu, de pouvoir être au bénéfice de sa puissance. La porte est ouverte « parce que tu as peu de puissance », certes, mais aussi parce que « tu as gardé ma parole et (…) tu n’as pas renié mon nom » ( v. 8 ).

 

— « (…) tu as gardé ma parole » ( v. 8 )… Dimension ici de l’obéissance à Jésus, à ses commandements. L’Eglise de Philadelphie était sans grande puissance, mais cela ne l’a pas empêchée de rester fidèle. Autrement dit : le fait de se sentir faible n’est pas une excuse pour ne pas obéir à Dieu et à sa parole.

 

à Obéir à Dieu, rester fidèles à ses enseignements, autant dans notre relation à lui que dans les engagements qui devraient en découler – concernant nos vies personnelles, nos relations avec nos prochains, nos vies d’Eglise, etc. –, ce sont là des conditions qui restent incontournables pour expérimenter dans nos « faibles » vies la puissance de Dieu… Bien sûr, le Seigneur ne nous demande pas de faire ce qui est au-dessus de nos moyens et de nos possibilités ( quoique… ). Mais il nous demande d’être fidèles dans tout ce que nous pouvons. Et nous pouvons souvent plus que ce que nous pensons, – c’est souvent aussi une question de choix et de priorités…

 

— Il y a ensuite aussi la mention que l’Eglise de Philadelphie n’a pas renié le nom du Seigneur : « (…) tu n’as pas renié mon nom » ( v. 8 )... Il s’agit là davantage de la dimension d’une fidélité qui s’est manifestée par le fait de continuer à confesser clairement la foi chrétienne même au sein d’un monde idolâtre et menaçant, voire persécuteur. Nous sommes cette fois interpellés par rapport à la tentation que nous éprouvons tous, je pense, de temps à autre, qui consiste à mettre un peu notre foi « en veilleuse », comme on dit, histoire de ne pas nous faire trop remarquer. Cf. mon malaise personnel quand mes enfants chantent à tue-tête des chants chrétiens sur le chemin de l’école…

 

à Nous nous trouvons généralement assez rapidement de bonnes excuses pour ne pas parler, ne pas dire notre espérance trop directement. Et c’est vrai qu’il faut avoir de la sagesse dans ces domaines, savoir attendre le bon moment. Mais il faut aussi veiller à ce que ce ne soient pas nos sentiments de honte ou de gène qui nous dirigent. Force est de constater dans ce domaine que les motivations qui nous animent ne sont pas toujours aussi pures qu’elles le devraient. C’est parfois tellement plus facile de suivre le courant, de ne pas se démarquer, ne pas marquer notre différence voire notre opposition à certaines pratiques, rencontres auxquelles nous consentons alors… Est-ce que ce ne sont pas là quelque part autant de manières de renier le nom du Seigneur ? Puisse-t-il nous en préserver !

 

Pour cela, pour nous aider, il importe de garder à l’esprit la perspective de ce qui est à venir. Et il y a à ce sujet dans notre lettre plusieurs promesses pour nous encourager à persévérer dans ce sens…

III. Une quadruple récompense

— Une quadruple récompense en effet est promise à l’Eglise qui reste, malgré sa faiblesse, attachée à Jésus et fidèle à ses commandements.

 

(1) Il y a d’abord la victoire promise sur les adversaires et forces d’opposition. La « synagogue de Satan » ( v. 9 ), désignant ceux qui, sans doute pour préserver leur tranquillité et ne pas trop se mouiller, préconisaient le maintien de pratiques juives, – cette synagogue n’aura pas le dernier mot. Et même, – belle inversion des situations ! –, elle sera amenée à reconnaître que les justes aux yeux de Dieu étaient justement ceux qui étaient restés fidèles à Jésus, même si cette fidélité était sans doute la cause de l’apparente faiblesse de la communauté : « Je ferai en sorte qu’ils viennent se prosterner à tes pieds et qu’ils sachent que, moi, je t’ai aimé » ( v. 9 ).

 

(2) Il y a ensuite la promesse d’être gardé à l’heure de l’épreuve : « (…) je te garderai moi-même de l’heure de l’épreuve qui va venir sur toute la terre habitée, pour mettre à l’épreuve les habitants de la terre » ( v. 10 ). Plus que d’une épreuve particulière liée aux circonstances de l’Eglise de Philadelphie, il s’agit sans doute ici plutôt de l’épreuve finale, le jugement dernier. Les chrétiens n’y échapperont pas forcément, mais il y a la promesse que Christ leur assurera le maintien de son aide. Ceux qui se seront efforcés de rester dans la fidélité à Jésus seront gardés ; quant à ceux qui auront été trop laxistes dans ce domaine, l’épreuve révèlera qui ils sont, à savoir des habitants du monde, et le Seigneur les jugera comme tels.

 

(3) Troisièmement, dit Jésus, les vainqueurs deviendront des « colonnes » dans le temple de Dieu : « Le vainqueur, j’en ferai une colonne dans le sanctuaire de mon Dieu » ( v. 12 ). Image de stabilité, de force, de permanence, etc. – ce après quoi nous soupirons bien souvent dans nos vies chrétiennes, nous qui sommes parfois ballottés à tous vents au gré des circonstances, de nos émotions, nos sentiments. Le Seigneur promet un état de stabilité et de force, dans son Temple ( spirituel ), duquel rien ne pourra nous faire partir : « il n’en sortira jamais plus » ( v. 12 ).

 

(4) Et enfin, Christ écrira sur le vainqueur « le nom de mon Dieu et le nom de la ville de mon Dieu (…) ainsi que mon nom nouveau » ( v. 12 ). Une manière de parler pour dire l’assurance d’appartenir à Dieu, pour toujours, sans que plus rien ne puisse venir mettre en péril cette communion… C’est aussi cela que Dieu tient en réserve pour ceux qui, aujourd’hui, s’efforcent de marcher dans la fidélité, en dépit du peu de puissance et de considération que cela leur procure peut-être aux yeux du monde.

 

— Ce sont là autant d’encouragements à la persévérance. Avec une question : Qu’est-ce qui importe le plus, finalement, entre le « maintenant », et ce qui est promis ( la victoire promise sur les adversaires et forces d’opposition, la promesse d’être gardés à l’heure de l’épreuve, la perspective de devenir une « colonne » dans le Temple de Dieu, et l’assurance de lui appartenir à toujours ) ?

 

à Sommes-nous prêts à accepter peut-être le mépris du monde, à accepter de n’être que peu considérés, vulnérables parce que ne cherchant pas à nous protéger par des moyens qui nous empêcheraient de rester pleinement fidèles à Jésus ?

à Sommes-nous prêts à payer le prix d’une véritable obéissance à Jésus même si cela peut nous coûter, nous amener à consentir certains sacrifices dans nos vies bien tranquilles où nous recherchons parfois plus notre confort et la réalisation de nos désirs que la fidélité à Jésus ?

 

Il n’y a pas de reproche adressé à l’Eglise de Philadelphie… Mais elle nous laisse un exemple à suivre, de fidélité quoi qu’il en coûte, en ayant les yeux fixés non pas tant sur le présent qui peut être difficile voire douloureux, que sur ce qui est à venir, promis par « le Saint, le Vrai, celui qui a la clef de David » ( v. 7 )…

Conclusion / Exhortation : Je te garderai… mais retiens ce que tu as !

— « Je te garderai », dit Jésus ( v. 10 ), mais il dit aussi : « Reste attaché à [Retiens] ce que tu as » ( v. 11 ).

 

à La protection divine et l’effort humain vont de pair ! Il est important de ne pas l’oublier. S’appuyer sur les promesses de Dieu, tout en nous rappelant la part d’effort qu’il nous appartient de faire, pour grandir toujours plus dans l’obéissance et la fidélité à Jésus, selon ce qu’il nous a révélé dans sa Parole et par sa vie. Cela peut être un chemin difficile, douloureux, certes, mais c’est le chemin de la vie…

 

Prière